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1754-1828 - Jean Argueyrolles - Curé d’Albussac

né le 9 mai 1754 au Peuch sur la Commune de Bassignac-le-Haut (19)  [1]

par ea (21/02/2010)

Eglise d
  • En octobre 1782 Jean Argueyrolles âgé de 28 ans est dit "Etudiant en Théologie". Il habite le Peuch, chez ses parents, pour mener à bien ses études, il peut compter sur son ami Jean Mas, déjà "clerc minoré", et sur le savoir de plusieurs prêtres voisins comme Pierre Jurbert, vicaire de Bassignac-le-haut et docteur en théologie ; François Delfau, curé de Bassignac-le-haut et gradué en la Faculté de Paris ou François Bayor, curé de Servières, licencié en droit canon.
  • Le 17 mai 1784 il se tirer un extrait des registres de naissance de Bassignac-le-haut par le vicaire Jurbert.

Il prouve ainsi sa filiation légitime, formalité indispensable en vue d’acquérir les ordres majeures.

  • en Aout 1785, Jean est "clerc minoré" lui aussi, ayant reçu déjà les quatre ordres mineurs : portier, lecteur, exorcistes et acolyte.
    Il habite toujours Le Peuch, mais il vient de perdre son père, Jean, décédé le 20 Mai dernier à 80 ans et veuf depuis longtemps. Jean qui a maintenant 31 ans est bien décidé désormais à " entrer dans les ordres sacrés et ensuite dans l’état de la prêtrise. Mais pour cela, l’Église, depuis l’ordonnance d’Orléans de 1561, exigeait des garanties supplémentaires.
    En effet, pour éviter l’existence fâcheuse de prêtres sans ressources, l’Eglise imposait, des le sous diaconat, la possession d’au moins un titre clérical, c’est à dire d’une rente annuelle assurée par les parents et amis jusqu’à l’obtention d’un " bénéfice".

On remarque sans peine que les tribulations de Jean Argueyrolles sont en relation avec les grandes décisions révolutionnaires nationales.

  • Dès 1791 la mise en application de la constitution civile du clergé ( votée par l’Assemblée Nationale le 12 Juillet 1790, et complétée par l’obligation décrétée le 27 novembre 1790) plaça Jean Argueyrolles , alors vicaire d’Albussac, au côté des non jureurs bientôt désignés comme insermentés, réfractaires. Aussi le voit-on quitter Albussac, le 3 Avril 1791, pour se réfugier chez son neveu et filleul Jean Argueyrolles ainé cultivateur à Dichaux dans la paroisse de Bassignac-le-Haut.
  • 19 Juillet 1795 jusqu’à cette date Jean Argueyrolles restera à Bassignac-le-haut au milieu des siens, dans une Xaintrie toute acquise aux réfractaires. Depuis Mai 1792 les réfractaires ont été déclarés "suspects" par l’Assemblée Nationale qui en Juillet suivant, leur interdit de s’approcher à moins de 8 lieues des endroits où ils ont exercé leurs fonctions. La situation s’aggrave quand le 26 Août 1792 la Législative les proscrit et leur enjoint de sortir de France sous quinzaine sous peine d’être déportés !
  • le 23 Avril 1793, la Convention décide la déportation des prêtres réfractaires en Guyane ou l’emprisonnement sur place pour les vieux et les malades. Le 18 Février 1794, Jean Argueyrolles est inscrit sur la liste des émigrés et décrète l’enfermement à la Maison des Récollets à Tulle. Heureusement pour lui la Xaintrie était une région sûre qui lui permit d’attendre la chute de Robespierre (le 27 Juillet 1794) et la fin de la Terreur.
  • Une relative accalmie est perceptible après Thermidor, lassée des querelles religieuses, la convention semble, le 18 septembre 1794, s’engager dans la voie d’une séparation de l’Eglise et de l’Etat : la République ne paie désormais plus de frais ou de salaire en matière religieuse. Le 3 ventose de l’an III, les offices sont autorisés, mais pas dans les lieux publics ; le 11 Prairial suivant les prêtres auront le libre usage des églises non aliénées. Désormais tout prêtre jureur, réfractaire, ex-prisonnier, ex-deporté pouvait exercer le culte. Au printemps 95 on vit donc les reclus sortir de prison et les déportés revenir à Albussac ; le 29 Aout 1795, Jean pouvait s’installer au Prézat, dans une maison appartenant à Pierre Salesse.
  • Le 25 octobre 1795 la tension remonta tout à coup, le Directoire vota une loi remettant en vigueur les mesures de 1792 et 1793 contre les prêtres réfractaires sommés de se rendre au chef-lieu de département pour être déportés au loi ou prisonniers sur place !!.
    Heureusement les autorités locales ne firent guère preuve de zèle et la mesure n’eut donc pas tout l’effet recherché …
  • Au bout d’un an, le Directoire sembla pencher à nouveau pour l’apaisement. La loi du 14 Frimaire An V ( 4 novembre 1796) supprimait toutes les mesures prises contre les "réfractaires" . Plein d’espoir, Jean Argueyrolles entreprit alors les démarches nécessaires pour obtenir sa radiation de la liste des émigrés : en effet, cette fatale inscription sur la liste lui paraissait d’autant plus injuste qu’il n’avait jamais quitté la région !
    • Dés le 23 Mars 1797, alors qu’il assistait à Goulles, en qualité de témoin, à la signature du contrat de mariage de Marianne-Josèphe Bétaillon avec son filleul et neveu Jean Argueyrolles aîné, il obtint de ce dernier une attestation de séjour à Bassignac-le-Haut avec constitution d’une rente viagère de 300 livres payables de 6mois en 6 mois. En cas de cohabitation avec son neveu, cette pension était réduite à 48 livres par an pour ses "menus plaisirs".
    • Poursuivant ses démarches, Jean Argueyrolles obtint ensuite, le 16 mai 1797 ( 27 Floréal an V) une attestation de la municipalité de Saint-Chamant, c’était alors le chef lieu du Canton, certifiant, sur la foi des déclarations de plusieurs citoyens d’Albussac, (François Denise, François Phialip, Etienne Raoul, Jean Chastrusse, Jean Long, François Chapou, Joseph Chastrusse et Pierre Salesse, tous cultivateurs), qu’il avait résidé sans interruption dans la commune d’Albussac chez Pierre Salesse depuis le 29 Août 1795 (12 Fructidor III) . Ce document fut affiché pendant 6 jours à St Chamant et à Albussac.
    • Après quoi, le 31 Mai 1797 ( 12 Prairial an V), Jean Argueyrolles se fit délivrer par la municipalité d’Albussac un certificat de résidence signé par Chastrusse, Dancie, Raoul et Malepreyre secrétaire, ce certificat fut enregistré à Tulle 2 jours plus tard.
    • Ayant ainsi prouvé qu’il avait, ces dernières années toujours vécu en Corrèze, soit à Bassignac-le-Haut soit à Albussac, avec des moyens suffisants, Jean Argueyrolles pouvait espérer arriver à ses fins.
    • Hélas, brusquement, au lendemain du coup d’Etat du 18 Fructidor An V ( 4 Août 1797), une loi du 19 Fructidor remettait en vigueur les mesures de 1792 et 1793 contre les prêtres réfractaires avec, en plus, l’obligation de prêter un "serment de haine" à la royauté et à l’anarchie ! Heureusement pour Jean, un inconnu vint le voir vers le 19 Fructidor ( 5 aout 1797), et le surlendemain " un homme du nom de François" vint le chercher avec un cheval.
    • En partant de Prézat, Jean Argueyrolles dit à son logeur Charrière "qu’il était obligé de se rendre chez ses parents afin de se mettre en règle". Il emporta "ses chemise, se livres et autres vêtements" et on ne le revit plus, si bien que lorsque le Dimanche 22 octobre 1797 ( 1er Brumaire an VI) Pierre Chastruse, agent municipal de la commune d’Albussac, se présenta au Prézat pour mettre sous séquestre les biens mobiliers de Jean Argueyrolles, il ne trouva personne … Interrogé Charriere déclara qu’Argueyrolles avait bien logé chez lui à l’occasion et à plusieurs reprises, mais qu’il n’avait aucun meuble, ce que confirmèrent deux voisins, Antoine Salesse et Pierre Long.
  • Cette fin du Directoire fut difficile pour Jean Argueyrolles obligé " d’errer et de s’ensevelir dans les antres , les rochers et les bois" selon ses propres termes.
    Réfugié le plus souvent à Bassignac-le-haut, plus sûr, il lui arrivait aussi de repasser par le Prézat ou, un jour, il faillit être pris dans la maison "Chastrusse dit Marmaille,… En effet, les gendarmes, sans doute prévenus, arrivèrent pour perquisitionner. Mais la famille ne livra pas le prêtre : une fille de la maison, Jeannette Chastrusse, qui avait de la toile sur la trappe ou il se cachait, s’assit dessus pour la coudre afin de tromper la vigilance des gendarmes. Ne trouvant personne, les gendarmes, irrités, se rendirent au village de Bedaine chez l’officier civil Chastrusse, mais celui-ci se hâta de les faire boire jusqu’à l’ivresse si bien qu’il ne fut plus question de procès-verbal.
    • Enfin le coup de d’Etat de Bonaparte le 18 Brumaire ( 9 novembre 1799) et l’avènement du Consulat allait mettre fin aux errances de Jean Argueyrolles. Dès le 27 décembre 1799 par souci d’apaisement, la loi demanda seulement aux prêtres une "simple promesse de fidélité à la nouvelle constitution" de l’an VIII. Comme il n’était plus question d’examiner si les prêtres avaient ou non satisfait aux exigences des serments prescrits par les lois précédentes, les réfractaires purent croire en la régularisation prochaine de leur situation. Jean Argueyrolles se décida à envoyer, en 1800, une lettre au nouveau Préfet de la Corrèze Verneilh-Puyraveau, pour que celui-ci lui "rende justice en lui rendant à la liberté". Dans cette lettre, Jean Argueyrolles rappelait les années difficiles qu’il venait de passer et terminait en signant " prêtre insermenté".
    • Le 11 Mai 1800 ( 21 Floréal an VIII), le Préfet renvoya cette lettre au Maire d’Albussac pour "renseignements sur la conduite morale et politique de ce prêtre pendant la Révolution". Le lendemain 12 Mai, le Maire Chastrusse répondait que le "citoyen Argueyrolles, prêtre", n’avait fait pendant la révolution "rien qui puisse nuire a sa conduite morale et politique". En conséquence, Monsieur Argueyrolles fût admis à une "mise en surveillance" et put reprendre son service à Albussac ou l’on note son retour le 12 aout 1800. Sur le "registre paroissial " on put lire désormais que " confesseur de la foi pendant la tourmente révolutionnaire, il ne quitta pas la paroisse et exerça toujours le saint ministère jusqu’en 1800" …
    • Finalement, le 4 Mai 1801, Jean Argueyrolles était nommé curé d’Albussac par l’administrateur Diocésain ; Pierre Joseph Brival, installé à Tulle et chargé de la remise en ordre de l’ancien diocèse de Tulle.
    • Mais décidément, le malheureux Jean Argueyrolles n’était pas encore au bout de ses peines. En 1805 il dut faire face aux accusations calomnieuses portées contre lui par un certain Peyrou soutenu par le propre maire d’Albussac, "individu immoral et ennemi juré de la religion" selon le curé d’Albussac. Ce dernier aprés s’être expliqué à Tulle avec Pierre Joseph Brival pour clarifier la situation, écrivit le 23 Novembre 1805 à l’Evêque de Limoges Monseigneur Du Bourg, "résidant en son palais", responsable, depuis le concordat du 17 Juillet 1801, des trois départements de la Haute-Vienne, de la Corrèze zt de la Creuse. Mrg Du Bourg était arrivé à Limoges fi Juin 1802. Dans sa lettre, Jean Argueyrolles lui fit part de son indignation, surtout à cause de la caution apportée à ses accusateurs par le naïf Pierre Capitaine, curé Cantonal de Servières, d’ordinaire pourtant mieux inspiré (Pierre Capitaine fut en effet le créateur du fameux séminaire de Servières…). Benoitement, Jean Argueyrolles ajoutait qu’il espérait que l’impardonnable crédulité de Pierre Capitaine ne vaudrait pas à celui-ci des "désagréments" de la part de la famille Argueyrolles très présente en Xaintrie ou elle jouissait d’une certaine "considération".
    • En terminant, Jean Argueyrolles assurait à son évêque qu’il s’emploierait malgré tout à apaiser la colère de sa famille contre le curé de Servières, lequel, demeurant, n’avait rien à voir avec la cure d’Albussac.
  • Le calme revint à Albussac ou Jean Argueyrolles termina paisiblement sa carrière. Il mourut dans son presbytère, à trois heures du matin, le 2 Avril 1828. Il avait 74 ans. On l’enterra le jour du Jeudi Saint…

Notes

[1] d’après un récit original de Paul Argueyrolles


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